27 May 2019

Un séjour dans le Nord-du-Québec pour la phase II du projet Robot360

Voici le récit de Sonya Fiset, conseillère pédagogique au service national du RÉCIT MST.

En avril dernier, j’ai participé avec Marc-André Mercier du service national du RÉCIT MST à la phase II du projet Robot 360 dans le Nord-du-Québec. Nous avons passé une semaine à l’école Nuvviti à Ivujivik, la ville la plus au nord du Québec. Nous avons été accompagnés par Jocelyn Michaud, conseiller pédagogique de la commission scolaire Kativik et par Alexandre Lepage du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur. L’objectif était de former les enseignants à la robotique et à la programmation en utilisant les robots mBot et Ranger que nous apportions grâce à la phase II du projet Robot360. Il y avait aussi d’autres robots, dont une imprimante 3D que l’école avait achetée dans le cadre des combos numériques.

 

Quelques semaines avant notre passage dans cette région, des employés du MEES ont tenu une rencontre de sensibilisation afin de nous informer de certaines réalités de la culture inuit et de nous présenter l’école et la communauté. Notre collègue Jocelyn a été un guide culturel tout au long de la semaine afin de soutenir nos présentations et notre intégration à la communauté.

L’école Nuvviti accueille un peu plus d’une centaine d’élèves du préscolaire à la fin du secondaire. L’enseignement y est donné en trois langues. L’inuktitut est enseigné dès la maternelle, et ce, à temps plein, jusqu’en 2e année. Puis, les familles choisissent la langue seconde. Environ la moitié des élèves poursuivent en français et l’autre moitié le font en anglais tout en poursuivant l’étude de leur langue maternelle. Cette petite communauté tricotée serrée, dont le nombre d’habitants s’élève à 370, est fière de son école et de son village.

Les habitants poursuivent les traditions ancestrales avec la pêche, la chasse et l’art inuit. Avec les journées qui s’allongent à la suite de l’équinoxe du printemps, la température qui s’élève et le soleil qui brille dans le ciel, les beaux jours arrivent peu à peu dans cette zone de la toundra dépourvue d’arbres et d’arbustes. Le roc est omniprésent et pointe ici et là sous la neige compactée par les grands vents qui poussent les flocons vers le large à la rencontre du détroit d’Hudson et de la baie d’Hudson.

Notre premier défi pédagogique consistait à animer un atelier afin de faire découvrir les ressources en robotique à l’aide d’activités qui amenaient le plus grand nombre possible d’enfants et d’enseignants à manipuler les robots avec des consignes transmises dans les trois langues officielles. Thomassie, directeur du centre et Inuit, assurait la traduction dans sa langue maternelle. Du jeu « Jean dit » pour prendre conscience de l’importance des consignes, à une course de Sphero en passant par la programmation avec Micro:bit, les jeunes et les moins jeunes ont manipulé les ordinateurs et les robots en modélisation.

L’organisation du reste de la semaine consistait à animer des ateliers avec les différents groupes afin de présenter les robots et des activités de découvertes. Cette approche a été privilégiée, car il n’y a pas de suppléants dans cette école et lorsqu’un enseignant est absent, les élèves retournent à la maison. Une activité de peinture avec Sphero comme outil a fait fureur. Et que dire de l’apprentissage du logiciel Tinkercad pour personnaliser un étui de cellulaire qui a été imprimé! Nous avons réuni des groupes afin d’offrir des activités quotidiennes aux enseignants. Les activités étaient offertes en français et en anglais. Pour les groupes de petits qui ne parlent qu’inuktitut, nous nous adressions à l’enseignant en anglais qui prenait le temps de traduire les consignes aux enfants dans la langue maternelle utilisée pour l’enseignement. Les pictogrammes ont été privilégiés pour soutenir la compréhension des élèves. ScratchJr a déclenché des productions autour de leur idole, David St-Jacques, astronaute de l’agence spatiale canadienne, qui a établi un contact avec des élèves du Nord dernièrement!

Une telle formation demande beaucoup de préparation autant du point de vue technique que logistique. En effet, l’internet par satellite n’est pas fiable dans le Nord-du-Québec alors il a fallu trouver des logiciels et les installer sur les portables de l’OPEQ (Ordinateurs pour les écoles du Québec) qui ont été expédiés avant notre arrivée dans le cadre du projet Robot360. Nous avons aussi transporté 10 tablettes empruntées à une école afin de nous assurer que les applications seraient installées et disponibles sans le WIFI. Il faut aussi prévoir des pièces et des piles de remplacement, car les délais de livraison sont souvent longs et coûteux. Finalement, le WIFI a été assez stable toute la semaine, malgré les lenteurs.

Un seul hôtel est construit et il n’y a pas de restaurant dans le village. L’épicerie, sous forme d’un magasin général, est ouverte 6 jours par semaine et pas sur l’heure du dîner alors il faut aussi prévoir apporter de la nourriture et utiliser la cuisine collective à notre disposition à l’hôtel. Les pâtes, les sachets et les cannes de conserve ont été très utilisés. On aime le spaghetti alors pourquoi ne pas en prévoir pour tous les soupers? Nous avons voyagé avec Air Inuit, car il n’y a pas de routes pour se rendre dans les villages du Nord-du-Québec. Cinq départs et atterrissages ont été nécessaires pour arriver à Ivujivik, situé à plus de 2000 km de Québec. À l’aéroport, la directrice principale, Mme Marie-Hélène Boyle-Baillot, nous attendait avec le camion de la commission scolaire pour nous amener à l’hôtel situé à l’autre bout du village, soit à un peu plus d’un kilomètre. Eh oui, c’est la taille du village!

 

Il est difficile de s’imaginer les obstacles et les contraintes ajoutés par l’éloignement de ces communautés. Il est aussi difficile d’avoir une équipe stable. Plusieurs enseignants sont des membres de la communauté, mais environ la moitié provient d’un peu partout. Mais souvent, ces enseignants sont là pour une courte période, alors la continuité et le contact avec les jeunes sont plus difficiles à assurer.

Tout au long de la semaine, j’ai relaté sur ma page Facebook des leçons de vie que j’ai tirées de ce court séjour dans le Nord-du-Québec. Je suis privilégiée d’être allée à la rencontre de ces enseignants dévoués qui travaillent dans le Grand Nord, souvent loin de leur famille. Les besoins sont aussi grands que les sourires et les étoiles dans les yeux des enfants qui ont eu beaucoup de plaisir à expérimenter et à apprendre les bases de la programmation et de la robotique en notre compagnie. Qui sait si l’impression 3D ne permettrait pas à cette communauté de développer une culture entrepreneuriale et aussi de répondre à un besoin d’autosuffisance dans la fabrication de pièces du quotidien qui tardent à arriver avec les délais et les coûts reliés au transport aérien. On ne peut qu’espérer avoir créé une étincelle dans les pratiques pédagogiques des enseignants que nous avons eu le bonheur de rencontrer.

Pour en savoir plus sur le projet Robot 360, vous pouvez consulter l’article publié l’an dernier par l’École branchée.

Merci, Sonya, pour le partage de cette incroyable expérience!

Nakurmiik

Marie-Eden Bergeron
Professionnelle en développement pédagogique et numérique
marie-eden.bergeron@education.gouv.qc.ca
www.recit.qc.ca
@recitqc
www.facebook.com/recitqc

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